Le Vaudou : les limites d'une exposition ethnographique
2 mars 2008
Samedi dernier, les membres de l'Association Genevoise pour l'Ethnopsychiatrie (AGE) avait rendez-vous au musée d'ethnographie pour visiter l'exposition intitulée "Le vaudou, un art de vivre".
J'avais des doutes sur ce qu'on peut montrer et transmettre dans un musée de ce genre à ce sujet. Peut-on mettre le vaudou dans un musée... ? Ou posons la question autrement: l'ethnographie peut-elle organiser une exposition dans un musée intitulée "Le catholicisme, un art de vivre" et ainsi attirer les foules?
Si cette proposition vous semble incongrue, celle de Robert Hainard me l'a semblé aussi. Je suis content quand même d'y être allé, ne serait-ce que pour y confirmer mes craintes...
Bien sûr, les objets sont "beaux" à nos yeux d'occidentaux avides d'étrange et d'exotisme, bien sûr nous avons là une collection d'objet "dignes d'être mis dans un musée", etc. Mais je me demande encore aujourd'hui quelle est la finalité d'une ethnologie qui ne montre que l'étrangeté et l'incompréhensibilité alors que je pourrais être séduit par une ethnologie qui tendrait à objectiver ces phénomènes "mystérieux" pour autant qu'on puisse les objectiver dans le pesant silence d'un musée.
En attendant, exhiber ces objets sacré, dont seuls les initiés en détiennent la compréhension, rappelle cruellement les dérivent de l'ethnologie du XIXème siècle. On est encore et toujours ainsi dans le folklore, dans le renforcement du mythe que l'on a créé avec notre regard d'occidental. La mystification ne nous fait pas avancer dans notre compréhension du monde.
Heureusement, nous avions un guide haïtien - initié au vaudou - pour nous guider et faire parler un peu ces objets. Mais je me demande, si il avait participé à la programmation de l'exposition, comment elle aurait été différente, je me demande même si elle aurait eu lieu.
Le vaudou, comme les autres traditions de certaines ethnies africaine en déportation dans les Amériques esclavagistes (Candomblé et Umbanda brésiliens, candombé uruguayen, etc.) n'est pas compréhensible à travers les objets qu'on lui vole. Tous ces objets ne sont la manifestation totalement périphérique d'un sens bien plus profond.
Un sens qui ne se comprends pas en lisant des textes, en regardant des objets dans des vitrines, ni même à travers des entretiens ethnologique avec des initiés.
Ici, le sens ne peut se comprendre qu'à travers la musique et la danse. Choses que bien sûr on ne fait pas dans un musée sérieux.
(Je suis le seul responsable de ces propos qui n'engagent que moi)
Ces extraits de musique sont disponibles sur ce site: http://www.juno.co.uk/products/172591-01.htm